Pourquoi il est urgent de former des professionnels de l’accompagnement collectif en entreprise.

Coaching d'organisation

Plus de 3 millions de salariés, en France, ont un risque élevé de faire un « burn out » ([1]). Ce chiffre est terrible, inquiétant. Il peut être discuté, contesté, notamment eu égard à la méthodologie de calcul utilisée ([2]).

 

Pour autant, il traduit bien ce que les intervenants en entreprise, coaches, consultants, psychologues du travail, sociologues constatent. Les salariés, à tous les niveaux de la hiérarchie, sont mis sous pression et soumis à une implacable logique d’optimisation organisationnelle et de recherche de la performance. Ce mouvement profond affecte massivement les salariés et le burn out et plus globalement les risques psychosociaux n’en sont que la partie visible. Quel que soit l’endroit ou le niveau hiérarchique, il faut produire d’avantage aujourd’hui qu’hier tout en accroissant la qualité du bien ou du service considéré.

Cette pression sur chacun ne s’atténuera pas dans les prochaines années promettant une intensification des difficultés individuelles. Pourtant, comme le dit un proverbe maure : « Le fardeau supporté en groupe est une plume ».

 

Et effectivement, la seule possibilité de rendre le poids et la pression supportable pour chacun est de faire fond sur la solidarité et la dynamique collective. Construire, densifier, renforcer la communauté humaine qu’est l’entreprise devient la seule réponse. Plus que jamais, la qualité de cette communauté humaine en termes de plasticité, de solidarité/solidité, d’agilité, de capacité d’apprentissage et d’intelligence collective devient le facteur clé de succès sans lequel la stratégie, l’innovation ou même le dynamisme commercial resteront insuffisants dans la durée.

Or, les spécialistes de l’accompagnement des organisations dans leurs dimensions collectives sont trop peu nombreux et difficilement identifiables par des Directions des ressources humaines qui parent le plus souvent au plus pressé et par des directions générales qui sous-estiment massivement la dimension collective de leur entreprise.

Bien entendu, les entreprises, notamment les plus importantes, mobilisent un grand nombre d’intervenants ; consultants en organisation, en stratégie, en management ou encore en ressources humaines, coaches individuels ou d’équipes, sociologues et psychosociologues qui permettent de poursuivre le processus global d’amélioration des performances tout en évitant que le système n’explose ou n’implose sous la pression.

Ces accompagnements sont à l’évidence de plus en plus insuffisants et inadaptés. Soit qu’ils soient partiels et ponctuels comme le coaching individuel et le coaching d’équipe. Soit qu’ils travaillent insuffisamment le collectif dans sa dimension humaine et interactionnelle comme cela reste trop souvent le cas du conseil. Soit encore qu’ils s’arrêtent le plus souvent à la phase de diagnostic dans le cas des interventions sociologiques et psychosociologiques en entreprise ([3]).

 

Il est donc urgent,  à la fois pour des raisons éthiques – peut-on réellement continuer à rechercher l’excellence et la performance au coût humain que l’on connaît aujourd’hui ? – et pour des raisons économiques, de former des professionnels aguerris aux dynamiques collectives et qui soient des experts du développement de la compétence communautaire.

Mais, que faut-il entendre par développement de la compétence communautaire ? Il s’agit, pour une part importante, de densifier les relations, de les assainir lorsque cela s’avère nécessaire. Il s’agit aussi de renforcer les capacités collectives d’apprentissage au sein des entreprises. Il s’agit encore de travailler à l’émergence d’une véritable intelligence collective par un accompagnement global qui ne sous-estime aucun des aspects – y compris inconscients – de tout collectif humain.

Développer de telles capacités au sein d’une entreprise toute entière ou de l’une de ses entités n’est pas inné. Cela suppose la mise en œuvre de processus permettant des prises de conscience et une maturation progressive. Or, seuls des professionnels de l’accompagnement expérimentés, très bien formés et supervisés peuvent réaliser de tels accompagnements.

Il est donc urgent pour notre économie, pour sa compétitivité, pour nos entreprises de prendre soin des salariés et de les accompagner sur le chemin de l’apprentissage de l’ « Être ensemble ». Tout le monde, salariés, dirigeants, clients trouvera dans cette nouvelle manière de travailler ensemble un regain de satisfaction et de mieux-être ainsi qu’un surcroît de performance.

 

Patrick Dugois

Sociologue de formation, ancien Délégué général d’Emmaüs France,

Patrick Dugois est coordinateur pédagogique

de la formation CESA Executive coaching d’organisation à HEC.

 

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[1] Ce chiffre est issu d’une étude réalisée par le cabinet Technologia publiée en janvier 2014.

[2] En effet, il s’agit d’un chiffre extrapolé à partir d’une enquête menée auprès d’un échantillon représentatif de 1000 actifs choisis selon la méthode des quotas qui met en évidence que 12,5 % d’entre eux sont potentiellement menacés par le burn out soit par extrapolation sur la population active plus de 3 millions de personnes potentiellement concernées.

[3]Il faut relever toutefois un mouvement de prise de conscience qui conduit de plus en plus sociologues et psychosociologue à s’interroger sur leur mode d’intervention en entreprise au-delà de la phase de diagnostic.

 

12 avril 2014